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shiiin
éliane radigue occam ocean 1
éliane radigue - occam ocean 1
shiiin eer1  CD  2017 épuisé
CD 1
01 occam river I pour birbyné et alto, 2012
carol robinson, birbyné
julia eckhardt, alto
14’ 19’’
02 occam I pour harpe, 2011
rhodri davies, harpe
29’ 14’’
03 occam III pour birbyné, 2012
carol robinson, birbyné
16’ 31’’
CD 2
01 occam IV pour alto, 2012
julia eckhardt, alto
21’ 11’’
02 occam delta II pour clarinette basse, alto et harpe, 2012
carol robinson, clarinette basse
julia eckhardt, alto
rhodri davies, harpe
25’ 03’’

éliane radigue : occam I, III, IV, occam river I, occam delta II
interprètes : rhodri davies, harpe – julia eckhardt, alto – carol robinson, birbyné et clarinette basse
ingénieur son : étienne bultingaire
mixage : étienne bultingaire et christophe hauser (piste 2 cd 1+2)
mastering : christophe hauser
direction artistique : carol robinson
crédits photos : ©igor juget

enregistré le 3 et 4 janvier, 2015 au studio de meudon
mixage à studio beaufils à montreuil et freebase studio à paris
livret
au début il y a cette image vue il y a si longtemps, au musée d’histoire naturelle à los angeles, l’image d'un long bandeau représentant les longueurs d’ondes connues. il était évident qu’au delà de la longueur d’onde de la terre au soleil, entre autres planètes, systèmes solaires et galaxies se déploient encore ces longues vagues. vertige de cet univers ondulatoire dans lequel nous baignons. tel notre propre corps également animé d’ondulations, de rythmes multiples. il est tout aussi vertigineux d’aller vers le mini, x-ray, gamma-ray et autre « nano ». dans ces inconcevables dimensions, il y a aussi cette toute petite zone, entre quelque 50, 60 hertz jusqu'à 12.000 ou plus pour quelques espèces ces vibrations se transforment en sons.
pour ne pas sombrer dans ce vertige, plus proche de nous sur cette terre, il y a l'océan. cet océan nous rapproche d'une contemplation plus accessible. outre son propre cycle, il reçoit également les fleuves qu'il nourrit. c’est la raison pour laquelle il y a beaucoup de thèmes de rivières dans les occam, de fleuves, de cascades, de sources, de fontaines… tous les thèmes sont associés à l’eau, nécessairement. c’est l’élément qui les parcourt, la représentation de la vie, la vie dans sa fluidité, comme la circulation du sang.
ce travail que je demande aux musiciens est d’une très grande exigence, ce n’est pas la virtuosité de la rapidité, mais la virtuosité d’un contrôle infime et absolu de l’instrument, une virtuosité extrême, subtile et délicate. ce que je faisais avec mon synthétiseur était presque semblable ; tourner un potentiomètre de la valeur d’un cheveu pouvait tout changer. pendant ma période de travail avec le feedback, le même protocole délicat du travail avec un micro et un hautparleur s'imposait. il y a une distance à respecter très soigneusement. aller au delà, le son disparait, aller trop près et le son éclate en effet larsen. il faut pouvoir garder le contrôle. je ne renie pas mon travail électronique, bien que je n’ai jamais rien accompli qui aie pu totalement me satisfaire. la finalisation restait toujours un compromis entre ce que j’avais voulu faire et ce que j’avais pu réaliser techniquement avec mes moyens. par contre avec les musiciens, j’ai enfin pu entendre pour la première fois la musique que j'appelais « mes phantasmes sonores ».
quelque soit le moyen utilisé le but essentiel est d’émettre, faire émerger les partiels, les overtones, harmoniques et subharmoniques, cette vibration qui est celle de l’air, non seulement celle de la corde ou du souffle, mais l'impalpable du son. l’instrument qui vibre au delà de la ou des fondamentales qui génère cette richesse extraordinaire qui devient fascination. cela exige une grande simplicité, sons tenus dans les nuances pianos à mezzo-forte au delà desquels la fondamentale redevient prédominante. d'où la fameuse règle du rasoir d’occam, il ne faut surtout pas en rajouter, mais privilégier ce contrôle du souffle, ou un simple frôlement, cette caresse d’une clé ou corde suffit à développer et enrichir cet univers infini.
dans les solos, j’attache surtout une grande importance à l'unité de « l'interprète et son instrument » cette osmose particulière où les choses sont là tout simplement, tout naturellement.
avec rhodri il y a eu d’abord l'émotion de la harpe, la harpe qui est un instrument que j’ai beaucoup aimé, que j’ai pris dans mes bras et puis que j’ai abandonné dans des conditions extrêmes. son image, ou thème a été immédiatement acceptée, et une fois établie, le mode de travail avec les deux archets était évident. rhodri a une extraordinaire ouverture d’esprit, une grande générosité, il y a quelque chose dans l’immédiateté de la relation qui est très simple, facile. on n’a pas besoin de grandes explications, en deux mots les choses sont là et tout va bien. ceci est normalement commun avec tous les musiciens que j'appelle les chevaliers d'occam....
carol m'avait fait la joie de partager son exploration de cette clarinette lithuanienne, ce birbynė à la fois simple et essentiel, fait d'un tube en bois percé de trous, une corne de vache, et une anche simple. je pouvais choisir dans tous ces sons délicats ceux que nous allions partagés. une pensée, souvenir lointain d'une tirade du cyrano de bergerac d'edmond rostand a surgi :
« pendant que sur sa tige tes doigts semblent danser un menuet d'oiseau » « qu'avant d'être d'ébène elle fut de roseau »... « que sa chanson l'étonne et qu'elle y reconnaisse l'âme de sa rustique et paisible jeunesse ».
le lent crescendo du début de l'occam de julia est à l'image de notre relation. le silence déjà musique, une légère vibration qui l'anime, perçue à devenir son...musique.
le trio a été simple, facile, heureux, allait de soi, dans un complet partage. magie...
j’étais prête à tout abandonner après naldjorlak, car c’est parfois très difficile de se demander qu’est-ce que je peux faire d’autre ? ce genre de chose m’est arrivé deux ou trois fois dans ma vie après avoir terminé une pièce qui me semblait aller au plus proche de ce que je cherchais. si je reprends, ça doit être quelque chose d’assez énorme. il faut rêver très grand, car dans la réalisation on est toujours obligé d’abandonner quelque chose. si le rêve est grand il en reste beaucoup, et si le rêve est petit, il n’en reste que très peu. les occam représentent quelque chose d’énorme puisque inachevable par nature. c’est ce qui m’a séduit dans une genre de pièce avec tant de possibilités de combinaison et richesse. ça m’interdit de dire que maintenant j’ai fini, tant que tous ces merveilleux musiciens me remplissent de la joie de leur magnifique talent.

éliane radigue